II y a parfois un monde entre ce que l’on est et ce qu’on rêve d’être. Qui n’a jamais souhaité devenir autre: plus audacieuse, moins prévisible, plus fantaisiste… Et si c’était là notre vraie nature?
Si un nouveau voisin, un employeur potentiel et un ténébreux sexy nous demandaient de nous présenter, on ne fournirait sans doute pas la même réponse à chacun. Chaque situation nous amène à mettre en lumière un aspect de notre personnalité, au détriment des autres. On imagine sans mal à qui l’on dévoilerait sa tendance pantouflarde, sa nature perfectionniste et son goût pour les bains de minuit! Rien de plus normal. Et il ne s’agit même pas d’un mensonge. Après tout, on n’adopte pas le même ton pour conclure une vente et pour chanter une pièce de Carmen Campagne à son filleul. En fait, les psychologues s’accordent à dire que pour s’adapter aux situations de la vie quotidienne, il faut savoir endosser différents rôles.
Faire la rencontre avec soi et changer pour vrai
HORS DES SENTIERS BATTUS
Pour certaines personnes, de tels jeux de rôles semblent presque une seconde nature. Des chercheurs intéressés par la question ont même distingué deux types de personnalité: celle qui préserve son image à tout prix, et celle qui ajuste son style selon les circonstances. Devant une nouvelle situation, la première cherchera comment trouver la place qui lui convient, alors que la seconde cherchera à mettre en valeur son meilleur profil. Pour elle, la vie est un cinéma dans lequel elle entend bien jouer plus d’un rôle. Véritable caméléon, elle se montre d’autant plus flexible face aux imprévus.
Nous aurions toutes avantage à faire de même et à sortir de notre moule de temps en temps. Selon les psychothérapeutes, « il est bon d’exploiter différents traits de sa personnalité ». D’abord, parce que les réactions de l’entourage peuvent nous en apprendre beaucoup sur nous-même. Ensuite, parce qu’une nouvelle perspective de soi peut s’avérer très utile dans certaines situations. En voici deux qui valent l’exercice.
Notre vie prend un tournant. Un changement de carrière, par exemple, demande des qualités qu’on n’a jamais développées. C’est le cas de Louise, une informaticienne que le travail confinait aux quatre murs de son bureau. Lorsqu’elle a décidé de voler de ses propres ailes en ouvrant son bureau de consultation en informatique, Louise s’est aperçue qu’elle devait vite développer ses habiletés de communicatrice!
Le train-train nous fait manquer le train. II n’est pas donné à toutes de mener une carrière fertile en rebondissements et en découvertes. Le jour où Lucie s’est surprise à commenter le prix du chou-fleur lors d’un souper mensuel entre copines, elle a mesuré à quel point sa vie manquait de piquant. Pour combler le vide que son travail n’arrivait pas à combler, elle s’est mise à fréquenter les vernissages et les premières de spectacle: tirée à quatre épingles, parée d’une nouvelle image, elle y a trouvé un nouveau souffle.
LIBÉRER LE TRÉSOR
Nous pouvons toutes renouer avec ces facettes méconnues de notre personnalité. Pour y arriver, quelques stratégies et un peu d’esprit d’aventure suffisent.
1- Écouter sa petite voix intérieure
Une grande élancée se faufile habilement entre les voitures avec ses patins. « J’aimerais donc être comme elle! », avoue la petite voix intérieure. Au lieu de se dire qu’on n’est pas du genre à découvrir Montréal en patins à roues alignées, accordons-nous une toute petite chance. Qui sait si ce trait de personnalité ne demande qu’à être titillé pour s’épanouir?
2- Trouver un allié
Une personne qu’on admire est souvent à l’origine de nos incursions en territoire inconnu. Raison de plus pour l’enrôler dans notre processus de changement. Un changement, ça se planifïe. Selon l’importance du changement, on aura intérêt à s’allier les membres de notre entourage. Si on a toujours admiré le flair d’une amie pour la mode, pourquoi ne pas l’entraîner dans une virée de magasinage? Peut-être nous encouragera-t-elle à essayer des vêtements qu’on n’aurait jamais effleurés du regard. L’oeil de l’autre est souvent l’encouragement qui nous fait défaut et sans lequel on s’enferme dans le même style depuis 15 ans. II sera toujours temps, debout devant le miroir, de décider si le vêtement nous va ou non. Le meilleur allié est souvent une amie proche qui nous connaît assez bien pour savoir quel type de changement gagnera notre faveur… pour peu qu’on l’essaie.
3- Préparer le terrain
Tous nos amis ne sont pas aussi réceptifs. Confrontée à notre soudaine passion pour le tango ou les dîners rencontres, notre meilleure amie peut sentir que les termes de la relation ont été modifié à son insu, et tenter de nous décourager de poursuivre dans cette voie. Et notre douce moitié ne partagera pas nécessairement notre enthousiasme pour les tatouages ou le jogging à l’aurore. En l’initiant en douceur ou en préparant le terrain, on évite les réactions négatives de l’entourage.
C’est souvent cette peur de déplaire et d’être rejetée qui nous empêche d’oser. Dans certains cas, il vaut peut-être mieux explorer ces nouvelles avenues en compagnie de gens qui partagent la même passion et qui nous encourageront à poursuivre. Plutôt que d’essayer de convertir la bande à notre engouement pour le végétarisme, on peut s’inscrire à un cours de cuisine végétarienne et réserver ses soirées tofu aux membres de ce groupe.
4- Utiliser des accessoires
Endosser un nouveau rôle dans son ancienne peau, c’est se mettre des bâtons dans les roues dès le départ. On aura beaucoup plus de facilité à jouer la carte de la séduction vêtue d’un body sexy que d’un survêtement de jogging une taille trop grande…
5- Prévoir quelques dérapages
Tout nouveau rôle nécessite des ajustements avant de nous aller comme un gant. Ce n’est pas une raison pour abandonner après le premier essayage. Pour éviter de se sentir « imposteur » au début, il suffit de préférer l’acclimatation au changement drastique. Par exemple, si notre peau n’a jamais connu autre chose qu’une crème de jour et qu’on veut adopter un maquillage sophistiqué, le plus simple est d’essayer un nouveau produit chaque semaine.
6- Choisir avec soin son champ expérimental
On a beau savoir qu’on joue un rôle, qu’on s’amuse à mettre en lumière un trait de notre personnalité, ce n’est pas précisément le cas des personnes qui nous connaissent peu. Le meilleur banc d’essai? Les blind dates. Carmen y a découvert ses forces et ses faiblesses: « Un homme m’a connue hyperdistinguée; auprès d’un autre, j’ai joué la carte copain-copine; un troisième m’a permis d’expérimenter mes talents de femme fatale! » De cette façon, nos premiers essais ne risquent pas d’être accueillis par un stimulant « As-tu bu?! »
PLACE AU CHANGEMENT
Si on a tout intérêt à découvrir d’autres facettes de sa personnalité, on aurait tort de pousser l’exercice jusqu’au point où l’on éprouve de la difficulté à se reconnaître soi-même. II n’y a rien de mal à changer de rôle, à condition qu’on respecte les autres et soi-même. Nul ne saurait nous reprocher notre conversion au Nouvel Âge, à moins qu’on ne se mette à garnir le bureau des collègues de pyramides énergétiques…
La peur d’avoir l’air – et de se sentir – inconstante ou incohérente nous empêche souvent d’explorer toutes les richesses de notre personnalité. Selon certains psychologues, le concept de l’identité unique prenait toute son importance à l’époque où les gens vivant dans de petites communautés n’avaient qu’une identité: on y était gérant de la caisse, propriétaire du magasin général, mère de famille, etc.
Aujourd’hui, on peut très bien être une mère au moment de conduire son enfant à l’école, une femme d’affaires lors du déjeuner de la Chambre de commerce et une amoureuse le week-end.
L’identité unique est donc chose du passé. Bien sûr, les grands traits de notre personnalité ne changent pas. Cependant, ce qui entoure ce solide noyau est très malléable. Nous avons tous tendance à agir et penser d’une certaine façon jusqu’à ce qu’une nouvelle situation nous force à modifier notre comportement. C’est la clé de l’aventure: en recherchant – ou du moins en ne reculant pas – devant des situations inédites, on peut réveiller des facettes endormies de notre personnalité. Plus on se donne la chance d’explorer des avenues nouvelles, plus on se permet d’être heureuse et épanouie.
Qu’on se rassure, ce même noyau solide nous dira si un nouveau rôle ne nous convient pas. Caroline s’est sentie beaucoup mieux le jour où elle a abandonné son rôle de supérieure autoritaire, un trait qu’elle admirait pourtant chez son patron. « Je ne m’y sentais pas à l’aise et je n’arrivais plus à communiquer avec mon équipe lors d’une rencontre. » Son changement d’attitude n’a pas compromis sa crédibilité pour autant. Au contraire, celles qui refusent d’écouter leur voix intérieure risquent de persister à jouer un rôle qui ne leur convient pas. Notre radar personnel se trompe rarement, dans un sens comme dans l’autre.
II n’y a rien de plus stimulant que de mettre au jour un aspect endormi de notre personnalité: tant qu’on demeure à l’écoute de nos émotions, on ne risque pas de renier notre véritable identité mais on la rend au contraire plus intéressante et plus riche.
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